Construction en paille

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Catégorie:Se loger


L'isolation de bâtiments avec des bottes de paille marque un tournant dans le monde très industriel du BTP car cette technique apporte des réponses aux problématiques écologiques, économiques et sociales

Historique[modifier]

La construction avec des fibres végétales existe depuis des millénaires, sur tous les continents. On cite souvent les singes qui se couvrent de branchages pour dormir. L'architecture de nombreux peuples était (ou est encore) basée sur l'utilisation de végétaux, notamment la paille (sous-produit de la culture céréalière), facile et rapide à mettre en œuvre et très isolante. Mais évidemment, il ne s'agit plus de construire des huttes.

C'est à la fin du XIXe siècle que des agriculteurs du Nebraska (États-Unis) ont utilisé les premières botteleuses mécaniques. La paille n'était donc plus mise en vrac, mais elle était rangée en blocs droits et légers. Le Nebraska manquant d'arbres et le sol y étant souvent très sableux, ces paysans ont logiquement construit leurs villages avec ce matériau. Le faible poids des ballots évite alors le mouvement des fondations. Ce type de construction fait petit à petit son chemin en Amérique du Nord, jusqu'à s'effacer face au béton et à l'acier.

Mais la maison en paille ne s'arrête pas là et au cours du XXe siècle l'idée fait son chemin. En 1921, M. Feuillette construit sa maison à Montargis (France) et propose cette solution pour reconstruire le pays après la guerre. Il n'est pas écouté et en 1930 la mode est plus à la construction de fortifications en béton que de construction légère en bois et paille.

Depuis une trentaine d'années, c'est le renouveau de la paille, des références comme "The Straw Bale House"[1] sont publiées, font parfois sourire, mais en attirent d'autres. Par exemple, des jeunes y trouvent une solution très intéressante pour construire sans s'endetter toute leur vie; une association étatsunienne s'en sert pour construire des logements aux Indiens qui sombrent dans l'alcoolisme et le manque de repère; des Européens ont construit avec les matériaux du bord une maison en paille en Inde.

En 1975 une maison est construite en 3 jours sur le terrain militaire du Larzac, ce qui symbolisera la lutte pacifique, écologique et anti-nucléaire, catégorisant par la même occasion les maisons en paille comme des solutions rurales, alternatives et bricolées.

Cette empreinte a duré longtemps, jusqu'en 2003 où, timidement, les premiers organismes officiels participent au projet Montholier (Jura, France) mené par Samuel Courgey. Des erreurs de conceptions et de réalisations n'ont pas permis de rendre les résultats de cette opération aussi intéressants qu'ils auraient dû l'être. L'expérience est toutefois jugée réussie "médiatiquement".

Début 2005 l'association "APPROCHE-Paille" diffuse une nouvelle technique de construction, éloignée des principes habituels de construction en paille, la technique du GREB. Le dynamisme de cette association sur la toile et dans les médias a encore plus démocratisé la construction en paille.

En 2005 également, l'association "Les Compaillons" , se met en place grâce à Philippe Liboureau, dit "le pailleux". Cette association mêle en son sein, maitres d'ouvrage, autoconstructeurs et professionnels. Son forum devient le lieu de rendez vous de toute la construction paille.

En mai 2006, André De Bouter (association La Maison en Paille) organise les premières rencontres nationales de la construction en paille à Celles sur Belle (France)qui rassemble les pionniers et les trois associations Approche Paille, les Compaillons et Botmobil créée par Tom Rijven. le RFCP (Réseau Français de la Construction en Paille) sera officiellement créé en Novembre 2006 lors des secondes rencontres nationales de la construction en paille organisés par les Compaillons ; ce réseau est symboliquement sous la tutelle de l'association "les Compaillons" et Philippe Liboureau en est le premier président. Ce réseau en plus des adhérents particuliers et professionnels va regrouper des concepteurs, des institutions et des associations de sensibilisation à l'écoconstruction sur tout le territoire national.

Aujourd'hui, le RFCP a édité règles professionnelles de la construction en paille (CP2012) qui encadrent dorénavant, depuis le 1er janvier 2012, les principes de la construction en paille, la botte étant isolant et support d'enduit. Le RFCP met en place avec de nombreux organismes et institutions les bases des formations qui permettront, par la reconnaissance de ce matériau et des métiers qui en découlent, l'essor de la construction en bottes de paille

Les techniques[modifier]

Aujourd'hui, il n'y a pas qu'une seule façon de construire en paille : Il y a des techniques sûres et simples, qui demandent plus ou moins d'expérience ou de technicités.

Longtemps expérimentale, la construction paille évolue vers une professionnalisation de la mise en œuvre, pour se rapprocher de plus en plus des zones urbaines où la demande commence à émerger.

Les bâtiments en paille étaient à l'origine, réservées aux zones rurales ou certaine catégorie de personne ("les écolos"), ceci dépasse dorénavant les frontières de la construction "alternative" pour devenir courante.

Technique NEBRASKA[modifier]

C'est la technique la plus ancienne et la plus rustique, faisant référence aux premières maisons en paille construite. Il s'agit d'empiler les ballots de paille de manière particulière et pour qu'elles portent la couverture. Les bottes de paille font office de blocs de construction; elles sont à la fois les éléments porteurs et l'isolant. Plutôt utilisée pour faire des petits bâtiments de plain pied et généralement en autoconstruction.

Les bottes sont directement enduites. Ce type de construction est peu coûteux et demande un minimum d'expérience pour éviter les risques, malgré la faible surface des ouvertures pour garder la stabilité de l'ouvrage. Seules quelques tiges de bois, de bambous ou de métal sont disposées de façon à éviter les mouvements. Les murs de ballots portent ainsi le toit. Cette technique est la plus ancienne et demande que très peu de matériaux. Elle limite son usage au plain pied, ce qui implique d'augmenter les surfaces de fondations et de toiture. Elle est rapide à mettre en œuvre, à condition de ne pas rechercher une architecture compliquée. Bien sûr, elle ne convient pas aux bâtiments spacieux et R+1 est un maximum pour quelqu'un d'expérimenté. On s'en sert en général pour des petits bâtiments utilitaires : grange, poulailler, garage, atelier, cabane...

Il faut noter que ce processus est peu répandu de nos jours (sauf en Angleterre), mais l'utilisation des grosses bottes de paille permet une nouvelle forme d'usage de cette technique pour de grands bâtiments, avec la contrainte de l'épaisseur de mur.

Technique Ossature Bois[modifier]

Elle comprend de nombreuses variantes. C'est la technique la plus connue et la plus utilisée.

Cette méthode utilise une ossature-bois définie par les DTU 31.2. Les bottes de paille sont placées en colonne dans l'ossature. Les vides entre les bottes sont comblés par des "bouchons de paille en vrac ou un mortier allégé.

La paille est ensuite protégée par un enduit, à la chaux ou à la terre crue, en respectant les principes de perméabilité à la vapeur d'eau des parois, c'est à dire au moins aussi perméable à l'extérieur qu'à l'intérieur.

Pour protéger la paille de la pluie, l'enduit extérieur doit être composé de trois couches réalisées avec des sables de granulométrie différente (de plus en plus fin, de la première couche, à la couche de finition), afin de repousser l'eau vers l'extérieur par effet de capillarité.

Cette technique est pénalisée par le coût et la difficulté de réalisation des enduits. Malgré le faible coût de la paille, le prix de revient du bâtiment fini, si l'on fait tout faire par des professionnels, est comparable à celui d'une maison en briques, il en est de même pour le temps de construction. Ce qui va à l'opposé du but recherché.

Technique « AUTRICHIENNE »[modifier]

Dans le cadre du développement durable, le gouvernement autrichien a été l'un des premiers à se pencher sur la construction en paille. Il s'agit de préfabriquer en atelier des panneaux de murs qui sont ensuite assemblés en quelques jours sur chantier.

De nombreuses possibilités sont connues et cette méthode est semble-t-il la plus "industrialisée" de nos jours. Le montage se fait à sec et le temps d'exécution est réduit comme pour les maisons à ossature bois. (la construction de l'école d'Issy les Moulineaux en paille est réalisé avec cette technique.

Il est assez facile de faire par soi-même certains travaux de la construction, réduisant ainsi le coût final, par exemple la pose du pare-pluie (fixé à l'ossature par des agrafes) ou encore des bottes de paille (de préférence après la pose du pare-pluie). Le montage est ainsi très rapide.

Attention cependant à conserver une façade extérieure perméable à la vapeur d'eau, tel un crépi à la chaux, un enduit respirant ou bien un bardage bois.

Technique du GREB[modifier]

Technique de construction développée au Québec par un groupe de recherches écologiques[2]. C'est une technique novatrice dans son approche constructive, avec une double ossature en bois enchâssant les ballots de paille. Au lieu d'appliquer un enduit comme dans de nombreuses techniques, c'est un mortier allégé à la sciure de bois qui est "coulé" dans des coffrages temporaires. Cette technique à l'avantage d'être particulièrement adaptée à l'autoconstruction de bâtiments compacts de 2 niveaux aux murs rectilignes.

Pour en savoir plus, consultez l'article détaillé Technique du GREB.

Technique CST (Cellule Sous Tension)[modifier]

Initiée par Tom Rijven et pratiquée par l'association Botmobil, cette technique est dérivée de la technique Ossature bois, mais sans contreventement bois, utilisant uniquement l'énergie de tension contenue dans les bottes de paille pour le contreventement de la structure.

Particularités de la construction en paille[modifier]

Les principaux avantages[modifier]

Le prix[modifier]

La paille est très isolante (donc, les factures de chauffage sont considérablement diminuées), les matériaux utilisés sont accessibles localement et parfois à bas prix (un ballot moyen coûte entre 1 à 2 euros, on utilise en général du bois pour la charpente et l'armature; les pierres et la chaux remplacent le béton armé et les autres matériaux industriels, importés parfois de l'étranger).

Surtout, il est très facile de construire soi-même sa maison en paille; or la main-d'œuvre nécessaire pour faire construire sa maison représente environ 75 % du prix. Au final, certains autoconstructeurs s'aperçoivent qu'il est possible de construire une maison soi-même pour un coût situé entre 500 et 1000 euros/m². Lorsque l'on fait construire par des professionnels (avec ou sans garantie décennale), les coûts sont situés entre 1000 et 1500€/m²

Matériau écologique et recyclable[modifier]

La construction n'a pas forcément besoin de matériaux industriels; mais ce n'est pas forcément non plus une cabane de pêcheur! De plus, le bâtiment est durable (la maison de M. Feuillette est toujours habitée) et quand il arrive en fin de vie, il retourne naturellement à la terre (biodégradable).

Une maison en paille est très saine[modifier]

Un mur en paille peut être enduit de terre, de chaux, coloré en peintures naturelles, sans faire appel à des solvants, des colles, des produits de traitement, des matières synthétiques éventuellement cancérigènes... Malheureusement, l'équipement et l'aménagement apporte généralement son lot de produits toxiques (tubes pvc, gaines et réseau électrique, mobilier, revêtements synthétiques, etc.).

La paille compressée en botte, est très isolante[modifier]

Donc, elle élimine tous les efforts techniques et financiers pour chauffer et isoler une maison. Il suffit de protéger les bottes par un enduit ou du bois. De plus, les enduits intérieurs apportent une inertie thermique importante permettant de garder chaleur ou fraicheur suivant la saison. Enfin, la paille serait aussi un bon isolant phonique et acoustique (une salle de musique a été construite en France).

Aussi[modifier]

  • Résistance au feu : les maisons en paille ne brûlent pas facilement, car les bottes de paille sont très comprimées, cela peut être comparé à un annuaire et une feuille de papier : la feuille de papier va brûler très rapidement et facilement tandis que l'annuaire va brûler difficilement puisqu'il est très dense. C'est la même chose pour la botte de paille.
  • Elle demande des matériaux disponibles localement : la paille (de blé, de riz, de seigle, etc.), du bois, de la chaux, de la terre et parfois des pierres. Reste évidemment quelques matériaux industriels : verre, conduits électriques et plomberie.
  • Elle est rapide et agréable à mettre en œuvre à condition d'avoir un peu d'expérience. Construire soi-même est aussi une expérience inoubliable et une formation grâce aux chantiers participatifs.
  • Les murs respirent : la paille fait circuler à travers elle l'air et l'humidité à merveille.
  • Les habitants mettent souvent en avant le confort hiver comme été.
  • Enfin, les constructions possibles sont très diverses, avec le matériau très fonctionnel qu'est le ballot de paille, vous pouvez réaliser la maison de vos rêves, suivant vos plans, l'architecture qui vous plaît, vous pouvez aussi la modifier plus tard. On peut dire aussi que construire en paille permet de ne faire que quelques étages dans un bâtiment : elle nous oblige à rester les pieds sur terre, à ne pas construire de grands ensembles!

Quelques inconvénients[modifier]

L'humidité[modifier]

C'est le point le plus important à surveiller pour les maisons en paille. En effet les murs doivent être très bien protégés pour éviter qu'ils ne prennent l'eau.

Ainsi, il faut qu'il y ait une bonne toiture, les murs doivent respecter certaines règles (garde au sol d'au moins 20 cm), rupture de capillarité et la gestion de l'étanchéité au niveau des fenêtres sont particulièrement important.

La règlementation[modifier]

L'absence de règlementation dans certains pays (dont la France) a rendu difficile la généralisation de ces pratiques. Depuis 2011, un ouvrage réalisé par le réseau français de la construction paille (RFCP) fixe des règles en la matière : "Règles professionnelles de la construction paille."[3] Les "règles professionnelles de la construction paille" sont un ouvrage technique de mise en oeuvre des bottes de paille en tant qu'isolant et support d'enduit.

  • C'est l'aboutissement d'un travail de quatre ans mené par des professionnels avec le concensus de toute la profession.
  • C'est le document officiel, équivalent à un DTU[4] reconnu par les autres professionnels du bâtiment, les autorités et les assureurs.
  • C'est un document unique pour tous : artisans, architectes, bureaux d'étude et de contrôle, maîtres d'ouvrage, autoconstructeurs ; décrivant les bonnes pratiques de mise en oeuvre.

Aussi[modifier]

  • Constructions limitées à 4 ou 5 étages (à moins de faire l'armature en béton et en acier...), voire un seul (avec la technique Nebraska).
  • Est l'objet de nombreux préjugés : la paille n'attire en aucun cas les rongeurs ou autres nuisibles, la paille résiste mieux aux incendies que le béton armé (des tests sont disponibles). Bien conçue, elle reste en place bien plus longtemps que certains bâtiments en béton (les HLM des années 70 se font déjà démolir aujourd'hui), elle n'est pas un retour en arrière, bien au contraire, elle permet de nombreuses architectures et va bien plus loin en matière de respect de l'environnement que le "développement durable" ou la norme Haute Qualité Environnementale.
  • La paille est loin d'être démocratisée : il faut souvent se débrouiller pour trouver les matériaux et le soutien et certaines personnes accrochées aux modes de construction industriels n'ont pas encore pris conscience de l'énorme potentiel de l'utilisation de la botte de paille dans la construction.

Voir aussi[modifier]

Références[modifier]

  1. (eng)The Straw Bale House (A Real Goods Independent Living Book), Chelsea Green Publishing, ISBN 0930031717
  2. GREB Groupe de recherches écologiques de La Baie
  3. http://www.compaillons.eu/boutique/reglesprofessionnellesdelaconstructionpaille
  4. Document Technique Unifié

Liens internes[modifier]

Liens externes[modifier]

Bibliographie[modifier]


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