Comment monter un projet d'écolieu

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Les définitions de ce qu’est un écolieu sont nombreuses et parfois contradictoires. De l’habitat groupé à l’éco quartier, en passant par la coopérative d’habitants, le cohabitat, la communauté intentionnelle, l’écovillage ou l’éco hameau, ces termes renvoient à une diversité d’initiatives portées par des individus, des groupes ou des collectivités qui ont en commun de repenser le rapport à l’habitat, à l’urbanisme, et plus largement d’expérimenter d’autres projets de société en mettant en œuvre un mode de vie collectif, écologique et solidaire. Que ce soit en milieu rural ou urbain, en rénovation ou en construction, en autopromotion ou par le biais d’un promoteur immobilier, on assiste à un foisonnement partout dans le monde de ce type de projets. Certains ont vu le jour, d’autres ont échoué. Tous ont néanmoins existés dans leur singularité, et ils enrichissent une histoire commune des démarches participatives d’habitat. Des réseaux et des structures d’accompagnement apparaissent, et ces concepts sont progressivement intégrés par les professionnels du bâtiment (architectes, promoteurs, aménageurs, bailleurs sociaux…). Il s’agit d’un mouvement de fond qui se réveille depuis 10 ans en France, qui s’organise, qui intéresse et qui se professionnalise à mesure que les multiples crises s’accentuent.

Cette fiche à pour but de présenter succinctement les fondements communs de ces approches différentes et de renvoyer le lecteur vers les différentes structures compétentes.


Enjeux

Ces initiatives naissent en réponse à un modèle idéologique fondé sur un mode de vie individualisé et matérialiste, exaltant la notion de propriété privé, renforçant les inégalités sociales, la destruction de l’environnement, la concentration des richesses, la privatisation des biens communs (espace, énergie, eau…) et les rapports de domination entre les humains. Cette situation est renforcée par la spéculation immobilière et foncière qui rend l’accès au logement de plus en plus difficile pour une tranche croissante de la population, par le développement de l’étalement urbain et le mitage des zones rurales (conséquence du transport individuel), par la séparation de plus en plus complète des fonctions du bâti (logement vs bureaux et commerces) qui appauvrit la cohérence et la richesse de l’espace urbain ou rural, et par l’utilisation croissante de matériaux et de techniques de construction nocifs pour la santé des habitants et pour l’environnement.

Ces initiatives ont en commun :

  • De faire cohabiter le privé et le collectif
  • La coopération entre les membres du projet
  • La participation des membres à la création, la réalisation et la gestion du projet
  • La réalisation d’économie par la mutualisation des moyens et des espaces

D’autres sources de motivation existent :

  • La responsabilité des membres à l’égard de la société et de l’environnement, en s’appuyant notamment sur l’éco construction
  • La qualité de vie : espace sain, voisinage choisi, retour à la terre...
  • Vivre ensemble : mixité intergénérationnel et sociale, accueil, entre-aide, solidarité, vie plus conviviale (rapports sociaux plus profonds)
  • Prendre en main sa vie en accord avec ses valeurs et se préparer au changement (idéal d'écologie et d'autonomie)
  • Repenser la notion de travail (frontière entre le travail et la vie, faire ensemble, pluri-activité…), et le politique (responsabilisation, rupture des dépendances…)
  • Une recherche personnelle : construction identitaire, démarche spirituelle…


Résultats, impacts

Un écolieu est un lieu physique (à la campagne : ferme, hameau, village, ou en ville : friche industrielle, terrain nu, bâtiment ou quartier) sur lequel des individus ont choisi de se regrouper pour vivre ou travailler ensemble. Ces groupes partagent en commun des valeurs, des espaces (salle commune, chambres d’amis, jardins/potagers, ateliers, espaces pour enfants…), des temps (repas partagés, jeux, garde d’enfants…) et dans certains cas les revenus. Chaque habitant dispose d’espaces privés siège de son intimité.

Chaque écolieu a son orientation, sa sensibilité et son fonctionnement propre. Il est le résultat de la vision d’un groupe fondateur et de l’adhésion de nouveaux individus.

Ce qui définit un écolieu et détermine son appartenance à l'un ou l'autre des types listés en introduction sont : sa structure organisationnelle, son mode de financement, son niveau d’autogestion, l’articulation entre les sphères privés et collectives (niveau de mise en commun), son mode d'intégration (ou non) de nouveaux membres, son ouverture et la nature de ses échanges avec la société extérieure, la définition ou non d'objectifs communs et le mode et les règles de vie adoptés.

Voici des exemples d’activités économiques que peut générer un écolieu :

  • Agriculture biologique, biodiversité, permaculture ;
  • Arts, artisanats et métiers manuels ;
  • Pépinière d'entreprises à critères éthiques ;
  • Écoles alternatives, chantiers, réinsertion, recherche ;
  • Production / transformation ;
  • Accueil, ressourcement, centre de formation ;


Mise en oeuvre

Ne sont présentées ici que les étapes clés caractérisant les projets d’écolieu issus de groupes de personnes se constituant autour d’un projet commun (et non les projets portés par une collectivité ou un promoteur privé).

La création d’un écolieu est un projet ambitieux et complexe, qui demande du temps et de la motivation. "C’est une sorte de très gros puzzle, dont on n’a pas connaissance de la totalité des pièces au départ.[…]C’est un sport d’équipe qui demande de l’échauffement, [de l’endurance], de se connaître, de se mesurer, d’évaluer ses forces et celles de l’équipe, de s’entraîner. La taille de l’objectif évoluera en fonction de cette préparation."

Voici les étapes qui seront rencontrées avant la construction.

Se rassembler et se connaître

  • Constitution du groupe
  • Réalisation d’un travail d’introspection personnel
  • Confrontation des projets personnels
  • Définition d’une culture commune et d’une vision partagée (charte)
  • Définition du fonctionnement (règles de communication : mode de régulation et de prise de décision, répartition des rôles)

Se structurer et s’outiller

  • Production du pré-programme par le Groupe (= les besoins)
    • Confrontation des besoins aux moyens disponibles
    • Mise en lumière des manques
  • Atelier d’urbanisme (=les moyens)
    • formation des futurs usagers (choix techniques, répartition des espaces publics et privés, collectifs et individuels, habitats et activités)
  • Production de l’avant-projet et chiffrage par la maîtrise d’œuvre (= les limites)
    • Étude du contexte (études paysagère, climatographique, sociologique, topographique, étude du bâti existant et des réseaux de voirie)

Agir

  • Définition de la structure juridique adaptée en fonction des besoins et des valeurs (lotissement, copropriété, association, indivision, SCI, SCIC, GFA…)
  • Montage financier et recherche de financements, de partenaires
  • Démarche opérationnelle:
    • Production des plans en concertation avec la maîtrise d’œuvre
    • Chiffrage du projet
    • Dépôt des permis de construire ou de l’arrêté de lotir
    • Achat du terrain


Là commence la construction du lieu et plus tard son fonctionnement (sa vie et ses règles, l’entrée et la sortie d’individus, ses inévitables conflits…)


Mise en garde

Beaucoup de projets tombent à l’eau avant d’éclore pour différentes raisons connues (relation humaine, problème financier, délais importants…)

  • 6 moyens de désamorcer les conflits structurels sont listés par Diana Leafe Christian dans son ouvrage Vivre Autrement : écrire une vision commune (aucun conflit n’est plus dévastateur qu’une divergence de vision), choisir un processus de prise de décision équitable et participatif convenant à votre groupe, établir des ententes claires par écrit, développer de bonnes aptitudes en communication et en processus de groupe, choisir des fondateurs et des nouveaux membres en fonction de leur maturité effective, cultiver les habiletés mentales et émotionnelles requises.
  • Bien que ces conflits soient connus, chaque groupe est unique et doit se faire sa propre expérience.
  • Par leur dimension collective, ses initiatives nous confrontent à notre être profond et notre relation aux autres, elles questionnent nos modes de communication et notre niveau d’individualisme. Ces initiatives comportent donc un important travail personnel. Il faut être conscient que ses problèmes personnels ne seront pas résolus dans le groupe et dans le projet. Cette prise de conscience est une des conditions fondamentales de pérennité.

Il est conseillé de ne pas sauter les étapes et d’envisager rapidement de se faire accompagner ou de se former collectivement aux techniques de communication adaptées à notre groupe (consensus, CNV, sociocratie).